Règles Pixar [1] – La réussite en question

You admire a character more for trying than for their successes.
Tu admires plus un personnage parce qu’il essaie que parce qu’il réussit.


[Que sont les règles d’or Pixar ? C’est expliqué ICI]

Admirer : Considérer quelqu’un ou quelque chose avec un sentiment d’étonnement mêlé  d’approbation, le plus souvent motivé par la supériorité qu’on lui reconnaît dans divers domaines de la vie intellectuelle, esthétique, morale, etc.

Cette règle Pixar pointe du doigt un défaut d’auteur qui consiste à ne pas confronter le héros à de trop gros échecs, de peur que le public le rejette pour cela. En conséquence, le personnage réussit toujours ce qu’il entreprend ; s’il échoue, ce n’est pas de sa faute. Ce défaut est la conséquence d’une philosophie winners & losers (ceux qui réussissent Vs Ceux qui échouent), un mode de pensée qui pourrit l’état d’esprit de beaucoup de gens… et nos récits, aussi.

Et pourtant…

Les grands défenseurs de la paix comme Nelson Mandela sont admirés, inspirent un grand respect, et obtiennent des Prix Nobel. Hélas, aucun n’a encore trouvé la solution aux guerres qui rongent le monde, tout comme L’Abbé Pierre a échoué à éradiquer la pauvreté.

À un autre niveau, nous sommes tous très impressionnés par ceux qui plaquent leur vie pour s’en construire une autre, par ceux qui tentent des exploits techniques ou sportifs de haute volée, par ceux qui se portent au secours de sinistrés en dépit du danger. Au final, peu importe si leur nouvelle vie est réussie, si le record est battu ou si le blessé est sauvé : notre opinion d’eux ne changera pas. Leur intention, en soit, est déjà très inspirante.

Et pour les personnages de fiction

Dans L’Empire contre-attaque, nous ne méprisons pas Luke pour son combat perdu contre Vador : sa cause est noble (sauver ses amis) et son courage grand. Il affronte plus fort que lui. Il perd son duel mais gagne notre respect : est-ce qu’à sa place nous nous serions jeté dans la gueule du loup comme il l’a fait ?

Dans Le Seigneur des Anneaux, Frodon ne cède-t-il pas finalement à l’Anneau ? Après tant d’efforts, au dernier moment, il échoue à le détruire. Nul ne lui jettera pourtant la pierre, et nous oublions même volontiers ce « détail ». À partir du Conseil d’Elron, alors qu’il se propose d’essayer quand tous les autres peuples se disputent la marche à suivre, Frodon gagne notre respect : lui, le plus petit d’entre tous, va défier le grand Sauron. Rien que parce qu’il essaie, il gagne le droit d’échouer.

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En conséquence :

Ne sois donc pas obnubilé par les échecs de tes personnages : focalises-toi sur ce qu’ils vont tenter ou pas. Ceux qui n’osent pas ne nous intéressent pas ; ceux qui se jettent à l’eau ont tout notre soutien (et plus l’eau est profonde et froide, plus notre soutien est inconditionnel). Un héros n’est pas obligé de toujours réussir. Il révèle même plus de choses intéressantes sur lui-même lorsqu’il échoue. Si sa cause est noble, on l’aimera du simple fait qu’il se dresse pour la défendre.

Pourquoi ? Parce qu’on aime les gens courageux, et qu’essayer est déjà en soi une preuve de bravoure. Nous sommes nombreux à « vouloir faire des choses » et à ne pas essayer, par peur d’échouer. Cette règle Pixar est une simple règle de vie. C’est bien connu : les seules choses qu’on regrette sont celles que l’on ne fait pas.

M’enfin, ce n’est que mon avis.



« On conclut ?
— Je suis sûr que ce sera un échec, mais si je peux y gagner un peu d’admiration, je veux bien essayer… »

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(13 commentaires)

  1. Merci ! Oui, montrer régulièrement au lecteur qu’on n’hésite pas à faire échouer le héros (et j’insiste : par SA faute) insinue en effet une part de suspens. On est un peu moins serein à l’idée d’un happy end qui n’aura peut-être pas lieu.
    Cette série est très longue, mais très variée (les thèmes et conseils abordent de très nombreux sujets). Pour ne pas trop saouler, j’intercalerai néanmoins cette série avec une autre, centrée sur un autre sujet qui me tient à coeur. Rendez-vous dans quinze jours 😉

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  2. C’est très intéressant et effectivement, il me semble qu’il s’agit d’une tendance très largement répandue. Il se passe beaucoup de choses subtiles entre un auteur et ses personnages, et il est vrai que nombreux sont celles et ceux qui hésitent à faire souffrir leurs protagonistes et à la confronter à l’échec. Dans un billet que j’ai écrit mais pas encore posté, je suggère la chose suivante: les personnages ne sont pas vos enfants. Une partie du boulot de l’auteur, c’est de leur rendre la vie dure, et le lecteur s’attache davantage aux personnages qui sont perpétuellement dans la panade.

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