« Je suis fait, je te l’avais dit !
— Je trouve ton discours bien terne… »
[Que sont les articles « focus » ? C’est expliqué ICI]
Les verbes ternes sont des verbes qui s’utilisent dans de nombreuses situations… si nombreuses, en vérité, qu’ils sont surabondants dans nos récits : avoir, être, faire, dire, se trouver…
Grâce à un outil d’écriture, il est possible de consulter les occurrences des mots utilisés, et ainsi savoir quels sont les mots qui apparaissent le plus souvent dans son texte. Si tu fais le test sur tes derniers écrits, tu constateras qu’il y a de fortes chances qu’arrivent en tête deux verbes : « être » et « avoir », dans des proportions qui te feront sans doute un peu peur. Ton outil d’écriture peut aussi te dénombrer le nombre de verbes ternes dans ton texte.
Si tu ne disposes pas d’outils modernes, tu peux au moins essayer de faire un essai sur quelques pages de ton dernier récit : prends un surligneur, et mets en valeur tous les verbes : une couleur pour les verbes cités ci-dessus, une autre couleur pour les autres. Rien qu’avec « être », « avoir » et « faire », cela devrait te sauter aux yeux, et assurer ta prise de conscience.
Statistique :
Le taux de verbes ternes se calcule aisément en faisant le ratio du nombre de verbes ternes sur le nombre total de verbes dans le texte.
— Si ton taux tourne autour de 10 %, il semble que tu sois dans une moyenne raisonnable ;
— Plus tu descends, et plus cela signifie que tu uses de verbes riches ;
— Si ton taux dépasse les 15 %, tu atteints une fourchette haute, et il serait peut-être pertinent de faire un effort sur ce thème, ou au moins de te pencher sur la question.
Il n’est pas souhaitable de bannir tous les verbes ternes (à supposer que cela soit seulement possible !). Néanmoins, les phrases prennent vite une tout autre couleur dès qu’on remplace ces verbes ternes par des verbes bien plus chargés de sens. De plus, « être » « avoir » ou « faire » nécessitent des compléments, et utiliser des verbes riches raccourcit ainsi tes phrases en les rendant plus directes.
Ex :
« Être au-dessus de » peut devenir « surplomber ».
« Avoir envie de » peut devenir « désirer ».
« Avoir du mal à » peut devenir « peiner à ».
« Faire à manger » peut devenir « cuisiner ».
Au départ, si cela ne te vient pas naturellement, tu trouveras la tâche pénible. Traquer et remplacer les verbes ternes sera un labeur de ta phase de réécriture. Néanmoins, peu à peu, cette gymnastique intellectuelle va devenir un automatisme, et dès ton premier jet, tu utiliseras de moins en moins de verbes ternes. Un vrai « plus », question style.
M’enfin, ce n’est que mon avis.
« Le verbe “ternir” est-il un verbe terne ?
— Tu n’aimes pas les maths toi, c’est ça ? »

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Coucou !
J’adore tes articles ! 😀
Faire à manger = préparer le repas.
Éviter « il y a » : transformer l’objet en sujet.
Il y a des pommes -> des pommes sont posées sur la table (verbe poser, hein ! Être est un auxiliaire !)
Il y a un problème -> un problème s’impose.
Etc 🙂
Je plussoie donc !
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L’absence de verbes ternes permet de séparer le n=bon grain de l’ivraie…
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A reblogué ceci sur Cinq petites secondeset a ajouté:
Stéphane Arnier donne quelques conseils pertinents sur la relecture et le travail de correction. C’est un peu comme Hemingway disait: écrire ivre et éditer sobre.
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Bonjour Stéphane,
merci bpc pour tous ces articles passionnants, je dévore ton blog…
Petite question : quel outil puis-je utiliser pour trouver les statistiques, que tu évoques, relatifs à mon texte ? (Pour écrire j’utilise Scrivener mais je ne sais pas s’il permet d’obtenir ces infos)
merci et belle journée
Caroline
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Bonjour Caroline ! En ce qui me concerne, j’utilise le célèbre Antidotes (pour moi, un indispensable parmi les outils d’écriture). C’est à la base un correcteur orthographique, et il fonctionne plutôt bien. Mais il intègre surtout tout un tas de dictionnaires de synonymes ou des outils super complets. Traquer les répétitions, les adverbes ou les formes passives devient très simple et rapide, et faire des stats aussi. C’est un investissement très vite rentabilisé si tu écris régulièrement (une centaine d’euros).
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Oui, j’utilise aussi Antidote 🙂
Par contre, permet-il d’obtenir les statistiques dont tu parles souvent sur ton blog ? (pourcentage de verbes ternes, taux de pronom relatif, taux de voix passive, longueur des phrases, …).
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Antidotes te fournit les nombres (de verbes ternes, de pronoms, etc.) et c’est à toi de calculer les taux. Pour te faciliter les choses, à la fin de mon article « Diagnostiquer son texte » (https://wp.me/p6KuvK-7G) il y a un lien pour télécharger un petit formulaire excel de ma conception : tu n’as plus qu’à y rentrer les valeurs que te donne Antidotes pour obtenir les taux.
Une seule exception : les adverbes. Antidotes est capable de te dire combien ton texte compte d’adverbes en tout, mais il n’est pas capable de distinguer les adverbes en « -ment » (pour mes nouvelles je les compte à la main, pour mes romans je laisse tomber ce calcul).
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Super, je vais « potasser » tout ça et m’amuser un peu 🙂
merci bcp pour ton aide précieuse.
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Cher Mr Arnier ! Merci pour un énième article passionant. Je suis dans la correction de mon manuscrit et l’article sur la distance « narrative » m’a déjà donné du fil à retorde ! Facile à corriger mais difficile à identifier pour ma part. Avec ce nouvel article sur les verbes ternes c’est un nouveau monde de cauchemar qui s’ouvre à moi ha ! Un exercise bien difficile pour passer à 10 % (en partant de 25% environ) Mais quel excercise fascinant ! Néanmoins je me questionne sur les dialogue, l’usage perpétuel de verbes riches ne rendra t-il pas les dialogues « pompeux »/ »arrogants » ?
Bien à vous et merci pour tout !
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Bonjour Laetitia ! Le contraire de « verbe terne » n’est pas « verbe exubérant ». Quand on conseille d’éviter les verbes ternes, cela signifie juste de se passer des quelques verbes passe-partout mentionnés dans l’article (rien qu’avec « être », « avoir » et « faire », tu as là le trio gagnant) : ça ne veut pas dire qu’il faut utiliser des verbes extraordinaires tirés d’un dictionnaire de vieux français ! 🙂 De nombreux verbes simples de la vie de tous les jours fonctionnent très bien sans être « ternes ». Bon courage pour la réécriture !
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Bonjour,
Quel échange !
J’ai lu cet article et tous les commentaires. Imaginez comment je me sens en ce moment. Je suis en quête de thème de mémoire pour mon programme de mastère en traduction. Après lecture d’un ouvrage traduit en français, j’ai constaté une abondance de mots, de verbes ternes, et comme je parcourais, pendant la même période, un ouvrage de stylistique française, œuvre dans laquelle l’auteur conseille de ne pas utiliser les verbes ternes et autres (il y a, ceci, cela, dire, faire, être, avoir, etc.) à outrance et d’en remplacer quelques-uns, je me suis posé la question de savoir si je ne peux pas me pencher sur cette question.
Que me conseillerez-vous ? Avez-vous des ouvrages à me proposer ?
Cordialement,
François Aristide ESSOH
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Bonjour ! Je ne sais quoi vous répondre, à part que ces articles « focus » proposés sur mon blog m’ont été inspirés par la lecture d’un ouvrage d’Olivier Lusetti intitulé « Comment mieux écrire, raconter une histoire et réussir sa fantasy ». Il y a toute une partie stylistique où il aborde ce qu’il nomme « les tendons du style », dont les verbes ternes (mais ce n’est qu’une toute petite partie du livre). Je doute qu’il existe des ouvrages spécifiquement dédiés aux verbes ternes, et je ne sais s’il y a tant de choses à en dire (à part qu’en abuser rend la prose ennuyeuse et redondante). Bonne continuation et à bientôt ! 🙂
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