Come up with your ending before you figure out your middle. Seriously. Endings are hard, get yours working up front.
Trouve ta fin avant de travailler les péripéties centrales. Sérieusement. Les fins sont difficiles, fais en sorte que la tienne soit la locomotive de ton travail.
[Que sont les règles d’or Pixar ? C’est expliqué ICI]
Je ne le fais pas exprès : je ne souhaite pas relancer un débat sur le fait de planifier son récit ou pas. Néanmoins…
Dans ce conseil, Pixar encourage vivement l’auteur à trouver sa fin avant de s’attaquer au développement central du récit.
Tu le sais bien : s’il y a bien un conseil que j’approuve, c’est bien celui-ci. Beaucoup d’auteurs (en particulier « jardiniers ») disent écrire sans connaître la fin de leur histoire, et ils en sont souvent fiers. C’est difficile à comprendre pour moi, qui considère que la fin – en tant qu’aboutissement ultime de l’ouvrage – est le moteur principal du travail créatif : chez moi, tous les éléments du récit sont conçus et agencés dans l’optique d’aboutir à cette fameuse fin.
Les jardiniers disent : « je ne peux pas savoir où mène le chemin si je ne l’emprunte pas ».
Les architectes disent : « je ne peux pas savoir quel chemin je dois emprunter si je ne sais pas où je dois aller ».
Ces deux visions sont logiques et imparables.
Ce n’est qu’affaire de point de vue.
Une énième opposition architecte/jardinier ?
Mais si on lit bien ce conseil Pixar, on remarque qu’il ne demande pas à l’auteur de planifier tout son récit avant de commencer à l’écrire. Il encourage l’auteur à identifier vers quelle fin il se dirige avant de travailler sa partie centrale. Ce n’est pas tout à fait la même chose, et je ne crois pas que ce sujet soit une nouvelle façon d’opposer des planificateurs et les improvisateurs.
Je pense que ce conseil s’applique à tous. En substance, il nous dit : débutez votre histoire comme vous l’entendez, mais une fois passée l’exposition de votre récit, une fois que les protagonistes sont en place et que vous vous engagez sur le chemin du récit, il est profitable de chercher un bon rocher en bord de route, de s’y hisser sur la pointe des pieds, et d’essayer de distinguer où le sentier va nous conduire.
Peut-être te tromperas-tu, ou manqueras-tu de précision (sûrement, même : souviens-toi de cet autre conseil Pixar). Et anticiper une certaine fin ne t’oblige pas à planifier avec précision toutes les étapes qui t’en séparent. Néanmoins, avoir une idée plutôt précise de ta fin te sera d’une aide immense pour développer ton milieu (que tu bosses en architecte méticuleux ou en improvisateur jardinier).
Ventre mou
Le « ventre mou » d’une histoire désigne d’ordinaire sa partie centrale, souvent plus « faible » en intensité que le début et la fin. Le milieu a plus de risques d’être morne et ennuyeux, longuet ou sans intérêt. C’est que, dans une histoire, ce n’est pas une partie facile à rédiger ! Les débuts sont souvent intrigants, les fins généralement palpitantes… et du coup, le développement central manque souvent de punch, en comparaison. Les architectes peuvent s’y perdre dans leur développement, les jardiniers y chercher leur chemin en tournant en rond.
Ce conseil Pixar a un double sens :
– la partie finale de ton récit est quelque chose de compliqué, donc pense-y tôt pour bien la préparer et l’amener ;
Mais aussi, en filigrane, son corollaire :
– la partie centrale est compliquée, et tu te simplifieras les choses si tu sais dans quelle direction tu dois la mener.
Ping Pong
En définitive, la seule vérité – quelle que soit ta façon d’écrire – est qu’aucun processus créatif n’est vraiment linéaire. Il est incorrect de penser qu’un auteur procède par étapes claires et définies, un pas après l’autre.
Faire un plan puis écrire ? Oui, mais l’écriture modifiera forcément ton plan.
Improviser de A à Z ? Si tu veux, mais ton développement t’imposera toujours de reprendre ton début.
Penser ta fin avant d’écrire le milieu ? Bon conseil, mais tu ne pourras pas l’écrire avec justesse tant que le milieu ne sera pas posé.
Développer tes péripéties au fil de l’eau ? Pas de souci, tant que tu as conscience qu’il te faudra les retravailler lorsque tu auras découvert ta fin.
Tout le monde le dit, tout le monde le répète (Pixar inclus) : l’écriture est surtout affaire de réécriture. L’auteur navigue sans cesse d’avant en arrière, d’arrière en avant, regarde le chemin parcouru pour voir où il mène, contemple la destination pour déterminer quelle est la meilleure route pour y parvenir. Certains planifient plus que d’autres, certains improvisent plus que d’autres, mais nous sommes tous obligés à de nombreux va-et-vient dans nos histoires. Un peu comme arpenter un sentier de randonnée en tous sens pour trouver le meilleur itinéraire et les meilleurs points de vue.
Et dans ce cadre, autant définir au plus vite tes deux extrémités : imaginer ton milieu sera plus facile si tu connais ton début et ta fin.
M’enfin, ce n’est que mon avis.
« Un peu comme manger une banane par les deux bouts.
— …
— Une histoire, c’est un arc narratif. Un arc narratif jaune. »
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Merci pour ces trucs et astuces toujours utiles à avoir dans un coin de la tête. Personnellement, (et sans spoiler les réponses à l’interview que Julien Hirt attend très très patiemment…) j’ai du mal à écrire sans savoir comment ça va finir ; une fois que la fin est connue, choisir l’entame est plus facile, même si les épisodes du milieu peuvent être encore flous… bref, je me demande bien pourquoi Pixar ne m’embauche pas ! je fais tout comme ils veulent 🙂
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La fin de l’histoire, c’EST l’histoire. En dehors de quelques tranches de vies et romans existentiels, si on ne sait pas où ça mène, selon moi, on ne sait pas non plus quel genre d’histoire on est en train de raconter. Finalement, ce qui vaut pour une blague vaut pour un roman.
J’ajouterais même que s’il est indispensable de connaître la fin, il est nécessaire de connaître le début et le milieu. Le reste, on peut s’en passer.
Encore un article très utile, merci.
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Merci pour cet article qui est, comme tous les autres, extrêmement interessant 🙂
En tant qu’auteure jardinière, je commence en effet la plupart de mes histoires sans en connaître la fin, néanmoins lorsque que je la trouve (vers du coup ce que je considère la « fin du début »), alors toute l’histoire prends sens, tout se met en place, le reste de mon improvisation se fera sur ce canevas, pour ce but-là, ce qui m’amène aussi bien sûr à réécrire le début… bref, tout ça pour dire que je suis tout à fait d’accord 😉
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