4 clefs pour un personnage solide

« Sommes-nous des personnages solides ?
— D’après cet article, carrément pas ! »


Ce blog ne manque pas vraiment d’articles sur les personnages. Néanmoins, je crois qu’il s’agit d’un sujet sans fin, que l’on peut aborder encore et encore sans jamais l’épuiser. Un récent sondage que j’ai vu passer sur twitter montrait « qu’avoir des personnages solides » était un point plébiscité par une majorité de lecteurs.

Mais qu’est-ce qu’un personnage qui se tient et « qui a du corps » ?
Voici 4 pistes de réflexion.

1. Il est caractérisé par des traits distinctifs.

J’ai déjà tenté de te convaincre de cela dans l’article spécifique Vs générique : la banalité est vraiment quelque chose que tu devrais chercher à éviter pour tes protagonistes. Certains auteurs veulent tant éviter les stéréotypes de « héros » qu’ils souhaitent à tout prix que leur protagoniste soit une « personne normale ».

Sauf que ça n’existe pas, les « personnes normales ». Certes, nous sommes tous un peu les mêmes, et pourtant nous sommes tous différents. Tous uniques. Et ce qui intéresse ton lecteur, c’est savoir ce en quoi ton personnage l’est.

S’il n’est unique en rien, il incarne l’ennui total, en plus de manquer de réalisme. Il est surtout la preuve d’un manque de profondeur : dans la vie, certaines personnes peuvent nous paraître banales ou anodines lorsqu’on les connaît à peine, mais si on creuse un peu on réalise que chacun à son histoire, ses idées, ses goûts. Il n’est pas nécessaire de chercher à faire « original » dans le sens « excentrique » : travaille plutôt ton personnage pour le rendre spécifique à ton histoire. Dessine-lui un caractère, donne-lui des talents en lien avec le thème que tu veux aborder ou le message que tu traites.

Nous avons tous nos spécificités, alors montre-nous celles de ton personnage. Il n’y a qu’ainsi qu’il nous intéressera et qu’on se souviendra de lui.

2. Il a un objectif clair et puissant, connu du lecteur.

Nous en avons parlé cent fois : si ton personnage ne veut rien et n’a besoin de rien, il n’y a pas d’histoire.

Tout le monde a des désirs ou des besoins, qu’ils soient conscients ou pas. Et si toi-même l’auteur ne connait pas les besoins inconscients du personnage, cela prouve juste que tu n’as pas encore creusé ton personnage assez profond.

Souviens-toi qu’il est capital de transmettre ces informations au lecteur le plus tôt possible. L’objectif du personnage est son moteur, et en conséquence il est aussi le moteur de l’histoire. Tant que le lecteur ne le connaît pas, il lui est difficile de s’impliquer.

3. Même si le personnage agit globalement d’une façon cohérente, on constate que dans des contextes différents il a des attitudes différentes.

D’un côté, il est important de montrer au lecteur que le personnage a un caractère stable et cohérent. Cela permet au lecteur de comprendre le personnage, de le cerner, ce qui est capital pour l’identification.

Néanmoins, voici un secret de la vraie vie : dans la réalité, une personne se comporte de façon différente lorsqu’elle se trouve dans des contextes différents. Tu n’es pas schizophrène, et pourtant tu n’agis pas tout à fait pareil chez toi ou au travail, avec tes amis ou avec des inconnus, en privé ou en public (tu ne t’habilles pas pareil, tu n’adoptes pas les mêmes postures, tu ne parles pas de la même façon). Il y a des situations où tu te sens à l’aise et relâché, d’autres qui te stressent, etc.

L’erreur classique revient donc à faire agir nos personnages de façon toujours identique quelle que soit la situation (un peu comme ces joueurs de jeux de rôles qui se justifient en disant « je joue mon personnage ! » alors qu’ils sont en train d’agir de façon absurde).

Pour donner l’illusion d’un personnage réel, tu as donc intérêt à varier les contextes et les situations dans lesquels tu places ton protagoniste, et à montrer en quoi il agit différemment selon les cas.

Ex : Un chef de gang odieux et pourri peut se montrer vulgaire et violent avec ses hommes, mais être très doux et affectueux en famille. Un personnage peut se montrer très à l’aise socialement, souriant, drôle et séducteur avec tout le monde, mais être lugubre et triste lorsqu’il se sait seul.

Immédiatement, le personnage sort d’un contexte caricatural (cabotin tout le temps, méchant avec tout le monde, cupide en toutes situations, etc.) et acquiert de la profondeur grâce à ces apparentes contradictions – des contradictions qui n’en sont pas vraiment, car nous sommes tous « contexte-dépendant ».

4. Il n’est pas figé et évolue

Es-tu la même personne qu’il y a cinq ans ? Seras-tu le même individu dans cinq ans ? Bien sûr que non. Donc, pour « faire vrai », montre que ton personnage n’est pas un bloc de marbre figé ; montre qu’il était différent avant et qu’il sera sans doute différent plus tard.

Comment ton personnage est-il devenu ce qu’il est au début de ton histoire ? L’expliquer via son passé permet de prouver que le temps l’a façonné. Dès que tu en as l’occasion, montre en quoi ce qu’il est aujourd’hui découle d’événements qu’il a vécu hier. Ainsi, le lecteur sait que le personnage est capable de changement.

Comment le personnage va-t-il évoluer ? Il arrive forcément des choses à ton personnage, sinon il n’y aurait pas d’histoire, pas vrai ? Si ces événements ne le font pas changer, cela signifie soit que le personnage est incapable de changement, soit que les événements du récit ne sont pas assez forts pour avoir eu prise sur lui (et c’est un risque d’ennui pour le lecteur, cf. article sur les obstacles). Donc, autant que possible, montre en quoi ce qu’il vit dans le récit le transforme. Car ça, c’est toujours fascinant.

***

Des personnages intéressants peuvent compenser les faiblesses d’une intrigue, mais je ne suis pas certain que le contraire soit vrai. Avoir des personnages qui « sonnent vrai », solides et captivants, est un bon moyen de conserver le lecteur jusqu’à la fin de ton livre.

4 points clefs à cogiter.
Pas si compliqué, non ?

M’enfin, ce n’est que mon avis.


« Ah ouais, on n’a aucun de ces quatre points nous !
— Voilà.
— Bravo l’auteur ! »


(9 commentaires)

  1. Avoir des traits distinctifs, c’est en effet important. J’ajouterais que plus un héros à des traits distinctifs très marqués, plus il a de chances d’être aimé ou détesté par le lecteur. En gros, ça va faire davantage réagir le lecteur − en bien ou en mal ! Alors qu’un perso « normal » ne va pas marquer l’esprit des lecteurs, comme tu le fais remarquer.

    Aimé par 1 personne

    1. Ce n’est pas faux sur le principe, mais c’est un peu dangereux de le penser comme ça : c’est ainsi que des auteurs se perdent à chercher des traits super originaux ou extrêmes. En vérité, *tout le monde* est différent, et *personne* n’est « normal ». Ce qu’il faut apprendre à faire, c’est justement faire ressortir en quoi la personne est elle-même ; et pour l’histoire, c’est souvent intéressant de le faire de façon thématique, comme je le propose dans l’article « Spécifique vs Générique ».
      🙂
      Merci de ton commentaire, à bientôt !

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