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Nouvelle adaptation française d’un article Mythcreants posté sur le blog de la plateforme Scribbook !
Et il nous concerne tous, nous auteurs, car la prose « mélodramatique » est un défaut qui nous guette en permanence, et un piège dans lequel nous tombons toutes et tous à un moment ou à un autre. Heureusement, Chris Winkle est là pour nous expliquer pourquoi ça ne marche pas, et comment s’y prendre pour que le lecteur ressente les émotions que l’on souhaite lui transmettre. Je te propose cela en version française chez Scribbook, et ça fait vraiment partie des articles qu’il FAUT lire au moins une fois.
Bonne lecture !
Écrire de façon mélodramatique est une erreur relativement commune chez nous, auteurs. Évidemment, nous voulons que nos histoires aient un impact émotionnel sur le lecteur, mais si nous ne comprenons pas comment cela s’opère au niveau technique, il est facile de se retrouver à la place avec un texte à l’eau de rose. Voyons ensemble ce qu’est une prose mélodramatique, pourquoi cela ne fonctionne pas, et qu’est-ce que nous pouvons faire pour que nos écrits aient l’impact émotionnel désiré. Ensuite, nous aborderons des situations particulières comme la dépression et l’anxiété, parce qu’éviter le mélodrame dans ce cas demande une approche technique différente.
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Un article passionnant, et très utile pour quelqu’un comme moi (mais je me soigne).
Cela dit, il me semblerait aussi intéressant de se demander, par provocation ou par souci de se montrer complet, « pourquoi le style mélodramatique _marche_. » Parce que le mélodrame, sous les formes les plus diverses, allant du catch aux soap opera, est très répandu dans la fiction, souvent populaire, et qu’il est évident qu’il touche une partie du public qu’une approche plus distanciée intéresse moins. Tourner en ridicule « 50 nuances de Grey » au nom d’un idéal esthétique, c’est aussi s’épargner d’avoir à se demander pourquoi certains lecteurs réagissent avec beaucoup d’enthousiasme à ce genre de texte.
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Je m’interroge, depuis hier, car sur le facebook de Scribbook on a eu un commentaire (un peu confus) et je me disais déjà qu’on parlait peut-être de deux choses différentes.
Est-ce que le « style mélodramatique » que Chris Winkle critique ici est la même chose que le genre littéraire du mélodrame ? Je ne crois pas.
Le mélodrame, en tant que genre, est très populaire. Mais ce qui plaît dans ce genre d’histoires, je ne pense pas que ce soit le style de l’écriture (disons que c’est populaire « malgré ça » plutôt que « grâce à ça »).
’50 nuances de Grey’ a fait un carton, mais je doute *vraiment beaucoup* que ce soit dû à la façon d’écrire de l’auteur : c’est son sujet osé et croustillant, sa mise en situation, qui lui a valu le bouche-à-oreille.
Et je pense qu’on peut écrire du soap opera d’un genre tout à fait mélodramatique, sans avoir recours aux phrases mélodramatiques qui servent d’exemples dans l’article.
(Mais c’est un avis à chaud, j’y songe encore ;))
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Non, tu as raison, ce sont bien deux choses distinctes. Souvent liées, mais pas obligatoirement.
Cela dit, je trouve un peu court d’argumenter que « les mots ne font pas naître les sentiments chez le lecteur. » Je pense que ça existe, un jeune lecteur qui lit une phrase comme « Grü’morgh sentit le pouvoir affluer dans ses veines avec la puissance de mille soleils-dragons, brûlante comme de la lave en fusion » et qui se dit « ouah, c’est cool. » De la même manière, d’autres lecteurs vont lire « Son cœur se brisa en d’innombrables morceaux, comme le cristal de glace d’un amour où l’hiver avait succédé trop tôt à l’été » et penser « C’est exactement ça que j’ai ressenti quand ça m’est arrivé. » Mais là, c’est une discussion différente, sur l’attrait du kitsch, un sujet que je trouve intéressant et qu’il ne faudrait sans doute pas balayer du revers de la main.
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Exemple avec Grü’morgh : la phrase est déjà pas mal évocatrice en elle-même, ok, mais elle le serait *encore plus* s’il y avait un contexte autour, par exemple si le personnage passait soudain en revue tout ce qu’il allait être capable de faire désormais. Si ton jeune lecteur lit ensuite : « Avec une telle puissance, Grü’morgh se sentait capable – se savait capable ! – d’exploser à main nue l’un des robots tueurs de l’Empire Mesh », là c’est sûr, il va se dire « trop cool ! ». Surtout si, dans toute la première partie du livre, ces fameux robots tueurs ont représenté un ennemi invincible et que ce sont eux qui ont décimé la famille du personnage. Tout à coup ce fameux pouvoir devient bien plus exaltant que l’image de la lave en fusion.
Idem pour ton deuxième exemple : la poésie de la phrase peut tout à fait avoir sa place dans le texte, et tout à fait avoir du sens pour le lecteur. Mais en soi, la phrase ne suffira pas à le faire pleurer s’il n’y a pas plus de contexte fourni avec (et je crois que c’est le seul argument de Chris Winkle). C’est joli, mais il n’y aura empathie que si l’auteur décrit les faits qui poussent le personnage a ressentir cela, si le lecteur les comprend et les mets en parallèle avec son propre vécu. Alors il aura la larmichette au coin de l’œil, et l’esthétique de la phrase peut porter le coup de grâce.
Il n’est pas question de retirer 100% des sensations physiques ou métaphores « racontées » de nos histoires. Il est plutôt question de s’en servir comme assaisonnement du contexte réel de la situation, plutôt que comme seul et unique support de description. Décrire que le personnage se sent puissant a peu de sens si on n’explicite pas du tout ce qu’il devient capable de faire ; décrire que le personnage se sent triste a peu de sens si on n’explicite pas du tout pourquoi il l’est.
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Merci beaucoup pour ce développement, même s’il n’est pas nécessaire en ce qui me concerne. J’étais déjà convaincu par l’argumentaire développé par l’article. Je me contente d’ajouter que certaines lectrices et certains lecteurs vont malgré tout, selon moi, se retrouver transportés par des descriptions et des métaphores qu’on peut considérer comme mélodramatiques, et cela même si elles ne s’appuient pas sur une construction dramatique. C’est en tout cas ma conviction, et c’est ce mécanisme spécifique – et son rapport au kitsch – qui me paraissent pouvoir faire l’objet d’un examen spécifique.
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Cet article est génial, il remet tellement de choses en perspective. J’ai un gros travail de correction en vue ^^’
(Par contre, je sais que ça vient de l’article original mais je ne suis pas convaincue par le choix de l’Epée de Vérité comme « exemple à suivre ». Oui le passage cité fonctionne bien, mais dans le reste du livre il y avait des passages tellement exagérés que j’étais obligée de poser le livre pour rigoler. Surtout pendant les scènes romantiques. ^^’)
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L’article explique très bien comment l’événement produit plus d’émotion que le commentaire. C’est très bien pensé de ce côté là.
Je suis moins d’accord avec l’idée que JKR aurait dû expliciter la dépression d’Harry Potter. Quand je lis un livre, je préfère qu’on me laisse ma part d’interprétation, et pas qu’on m’explique ce que je dois penser de la situation. De même » aider à réduire la stigmatisation des neuroleptiques », c’est de la bien-pensance. Tant mieux si c’est le cas, mais l’objectif principal quand on écrit c’est de raconter une bonne histoire sinon, il faut écrire du feel-good.
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Tout l’art de l’écriture repose sur ce difficile équilibre, entre transmettre *son* histoire aux gens, tout en leur laissant leur part d’interprétation. Le souci, c’est quand nos lecteurs nous comprennent de travers, voire à contresens, parce qu’on n’a pas su être assez clairs ou explicites.
Le fait est que de très nombreux lecteurs ont été agacés par l’attitude d’Harry dans cette phase du livre (moi le premier, et je m’en souviens très bien), parce qu’ils n’ont pas compris ce qu’il se passait. Harry lui-même semblait incohérent, et l’attitude des autres personnages en décalage.
Quand on sait combien de personnes sont touchées de dépression chaque année, et quand on sait l’impact énorme que peuvent avoir de tels succès de littérature sur les lecteurs, il est vraiment dommage que le sujet n’ait pas été traité comme tel.
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Pas d’accord. Le nombre de personnes touchées par la dépression n’est pas un argument qui devrait influer sur la façon dont on raconte une histoire. Il ne s’agit pas que d’un sujet à traiter. Les romans « à message » suscitent chez moi beaucoup d’agacement. Le lecteur n’a-t-il pas sa perception du monde ? Il ne peut pas interpréter « de travers ». Que le lecteur n’étiquette pas la dépression de HP, nous en dit beaucoup plus sur la place de la dépression dans la société. Il arrive en effet qu’elle reste méconnue, que le comportement de celui qui la traverse soit incompris. La vie n’est pas lisible, ni les sentiments, ni les gens. Il faut y chercher les signes et les interpréter. Et peut-être que les jeunes lecteurs relisant le livre, quelques années plus tard, riches de nouvelles expériences, en feront une nouvelle lecture.
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Je ne sais pas trop quoi répondre, Claire. Je ne suis pas sûr qu’on se comprenne bien sur ce coup-là . Je suis plutôt d’accord avec toutes tes phrases, pourtant, mais j’en tire des conclusions différentes.
Ce n’est pas bien grave. 🙂
Ta vision et ton focus côté lecteur sont intéressants, même si dans mes articles je me positionne surtout en tant qu’auteur. L’écriture est un moyen d’expression : si la majorité de mes lecteurs comprend le contraire de ce que je pense avoir écris, c’est que je ne me suis pas exprimé correctement. Je raconte des histoires, pas des charades. Si mon protagoniste souffre de dépression, la majorité de mes lecteurs devraient comprendre qu’il souffre de dépression, sinon je n’ai pas bien fait mon job. Et vice versa : si mon personnage ne souffre *pas* de dépression, il ne devrait pas se comporter comme si c’était le cas.
Bon, comme d’habitude, ce n’est que mon avis.
🙂
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Oui, pas bien grave. Et ce n’est aussi que mon avis. Merci de prendre le temps de réfléchir à ce qu’est l’écriture.
Et j’ai adoré ta phrase: « Je raconte des histoires, pas des charades. »
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