Les chapitres

Par le biais des réseaux sociaux, quelqu’un m’a directement demandé de parler du fonctionnement des chapitres. Il se trouve que c’est un sujet qui revient beaucoup chez les personnes qui écrivent, mais… hélas, les questions les plus fréquentes au sujet des chapitres sont généralement les moins utiles. En particulier, beaucoup d’auteurs semblent complètement obnubilés par la taille que font leurs chapitres, ce qui est un peu étrange. Pourtant, il existe bien des choses à dire au sujet des chapitres, alors cet article leur est aujourd’hui dédié.

Note : un merci à Pierre qui m’a interpellé sur les réseaux pour me poser les questions suivantes : « Je ne sais pas si tu acceptes les suggestions de sujet pour tes articles de blog, mais je suis curieux de connaître ton avis sur le découpage en chapitres. Te fixes-tu une taille minimale ou maximale par chapitre ? Comment commencer et terminer un chapitre ? Comment éviter les chapitres de remplissage ? Faut-il donner un nom à ses chapitres ? Existe-t-il d’autres moyens que le chapitre pour inciter le lecteur à prendre le temps de méditer sur une situation ? » Cet article n’est pas spécifiquement une réponse à Pierre, mais j’essaierai par son biais de passer les différents points en revue.

Que sont les chapitres ?

Dans un roman de fiction, les chapitres sont une façon de découper l’histoire en plusieurs morceaux – des morceaux qui se suivent et qui forment un tout cohérent. Au lieu d’écrire toute l’histoire en un seul bloc, l’auteur marque une pause d’une façon bien plus franche qu’avec un simple retour à la ligne ou un saut de ligne : il procède carrément à un saut de page, avec le prochain chapitre qui commence sur une nouvelle page.

Avant d’aller plus loin, précisons que tous les romans de fiction ne sont pas découpés en chapitres. En imaginaire, par exemple, le célèbre auteur Terry Pratchett a publié un grand nombre de ses romans du Disque-Monde sans chapitrage. Il est d’ailleurs connu pour la citation suivante :

“Life doesn’t happen in chapters — at least, not regular ones. Nor do movies. Homer didn’t write in chapters. I can see what their purpose is in children’s books (“I’ll read to the end of the chapter, and then you must go to sleep”) but I’m blessed if I know what function they serve in books for adults.”

“La vie ne se déroule pas en chapitres — du moins, pas les vies ordinaires. Les films non plus. Homer n’écrivait pas en chapitres. Je peux comprendre leur intérêt dans les livres pour enfants (« Je lis encore jusqu’à la fin du chapitre, et ensuite au dodo »), mais je serais bien content de savoir quelle fonction ils servent dans la littérature pour adultes.”

L’un de mes romans de science-fiction préférés, Outrage et Rébellion de Catherine Dufour (dont j’ai déjà parlé ici) n’est pas non plus organisé en chapitres. Néanmoins, il est organisé autrement, et même Terry Pratchett a fini par se convertir au découpage par chapitres : c’est donc que le chapitrage est utile à quelque chose.

Changement d’unité

L’une des utilités à chapitrer son histoire, c’est d’indiquer clairement au lecteur un changement important d’unité dans son récit, qu’il s’agisse d’unité de temps, d’espace ou d’action. On peut le faire sans changer de chapitre, mais on peut rendre ce changement bien plus marquant et signifiant avec.

Par exemple, il est possible de faire passer le temps dans la narration simplement au détour d’une phrase : « Cela leur prit trois jours, mais ensuite… ». Néanmoins, couper le récit et entamer un nouveau chapitre débutant par : « Trois jours plus tard » met l’emphase sur le temps qui vient de passer. De la même façon, il est possible que les personnages se déplacent et changent de lieu à l’intérieur d’un même chapitre, mais là encore, interrompre le chapitre en cours et en commencer un nouveau dans un nouveau lieu marque l’importance du changement. Enfin, on peut très bien passer d’une scène calme de dialogue et une soudaine scène d’action dans un même chapitre, mais marquer la transition par une coupure nette clarifie au lecteur qu’on change soudain d’ambiance. Ce n’est donc pas une règle ni une obligation, mais c’est un moyen pour l’auteur de souligner l’importance du changement. C’est un outil narratif.

Il existe d’autres changements importants que l’auteur peut marquer grâce à un changement de chapitre :

  • Un changement de personnage de point de vue (dans le cas d’un récit choral)
  • Un changement de narration (dans le cas d’un récit qui intercale des narrations différentes)
  • Un changement de thématique ou de sujet central

Ainsi, insérer un changement de chapitre est le plus souvent une façon polie d’indiquer au lecteur : « Attention, un changement significatif se produit ».

Une histoire dans une histoire dans une histoire

Une fin de chapitre peut également être une conclusion narrative. Car oui, beaucoup d’histoires ont une structure fractale : il y a une ligne directrice générale (qui commence au début du livre et se termine à la fin), mais cette grande histoire est découpée en plusieurs sous-parties (il existe de nombreuses structures narratives possibles), et ces sous-parties peuvent être elles-mêmes découpées en plusieurs scènes, qui sont autant de « mini-histoires ». Tout ou parties de ces scènes peuvent faire l’objet de chapitres.

Quelle que soit la façon dont l’auteur découpe et organise son récit, le chapitrage a donc cette capacité à mettre en relief cette structure, à la clarifier dans la tête du lecteur. Mieux un auteur gère son chapitrage, plus le lecteur a de chance d’être emporté par le rythme de l’histoire et de ressentir un sentiment de progression.

Confort du lecteur et sentiment de progression

Ainsi, une autre utilité du chapitrage est plus prosaïque, mais tout aussi importante : c’est plus confortable à lire.

  • Premièrement, découper l’histoire en chapitres offre au lecteur des « opportunités faciles » de faire une pause dans sa lecture. Il n’y a pas que pour les enfants que ça marche : nous sommes de nombreux adultes à stopper notre séance lecture au point de césure entre deux chapitres. La plupart du temps, le changement de chapitre induit un changement dans le récit ou la fin d’un petit arc narratif (voir paragraphes précédents), et c’est donc un bon moment pour s’accorder une pause avant de passer à autre chose. C’est aussi plus facile de « se remettre dans l’histoire » en reprenant la lecture au début d’un nouveau chapitre, et pas en plein milieu.
  • Deuxièmement, le sentiment de progression que le lecteur ressent est primordial dans son envie de continuer à lire. Si l’histoire est d’un seul bloc, il aura du mal à se rendre compte de cette progression, et cela peut lui paraître plus long que cela n’est réellement. Alors que s’il voit les chapitres défiler, il a l’impression d’avancer dans son parcours, de se voir progresser vers la fin. C’est psychologiquement rassurant et encourageant.

C’est d’ailleurs un amusant paradoxe de penser qu’une fin de chapitre représente une opportunité de pause pour le lecteur, tout en sachant que les auteurs redoublent d’astuces pour encourager ce dernier à poursuivre sa lecture au-delà (comme par exemple en usant de cliffhanger). Or, c’est justement important pour les auteurs de se rappeler ça : mettre des cliffhangers à la fin de tous les chapitres n’est pas agréable pour le lecteur, car cela lui retire ces opportunités de pause que sont les fins de chapitre. C’est comme arriver à un gîte après des heures de randonnée pour réaliser qu’il est fermé et qu’il faut continuer jusqu’au prochain : pas cool. Ainsi, une majorité de chapitres fonctionnent mieux s’ils procurent ce sentiment de « mini-fin » permettant de souffler. Quelques cliffhangers bien placés fonctionneront d’autant mieux qu’ils seront ponctuels, et pas une mauvaise habitude.

Format de chapitrage

Au niveau de la mise en forme, il suffit d’un coup d’œil aux différents livres de nos bibliothèques pour se rendre compte qu’il existe de très nombreuses possibilités. A minima, une fin de chapitre est marqué par un saut de page, avec le début du nouveau chapitre sur une nouvelle page (généralement en page de droite). Mais un nouveau chapitre peut également recevoir bien d’autres marqueurs, qui peuvent se cumuler entre eux : un numéro chronologique (ou antichronologique !), un titre, une date, une citation ou un proverbe, un extrait de texte informatif appartenant (ou pas) à la fiction, une illustration, etc. Un titre de chapitre peut être court ou long, faire directement référence à ce qui se passe dans le chapitre ou pas, faire office de teaser, être informatif ou mystérieux, etc.

Quel est l’usage, alors ? Que doit faire un auteur ? Eh bien, il n’y a pas d’usage type, à part de respecter une certaine cohérence tout au long d’un même ouvrage. La mise en forme des chapitres relève de la créativité de l’auteur et de l’effet qu’il veut obtenir avec.

En ce qui me concerne, je crois que le choix de formatage des chapitres devrait être considéré par l’auteur à la lumière du choix de sa narration. Par exemple, la présence de titres ou de citations est plus logique si on emploie un narrateur omniscient, les dates ou extraits historiques sont plus fréquents à la 1ère personne au passé pour l’aspect réaliste que ça apporte, et l’absence de tout marqueur permet de favoriser l’immersion à la 3ème personne focalisée ou la 1ère personne au présent. Ce ne sont pas des règles à respecter absolument, mais simplement une association logique d’effets de rendu qui se renforcent les uns les autres.

Ex. : si on a choisi une narration en 3ème personne focalisée, c’est normalement pour créer une forte immersion. Ainsi – et même si cela n’est pas « interdit » – ça ne semble pas très logique de vouloir marquer les chapitres par des titres humoristiques, qui sortiraient ainsi le lecteur de la fiction et iraient à l’encontre de l’immersion recherchée.

On peut donc tout faire, en gardant en tête l’effet qu’on cherche à produire en utilisant tel ou tel marqueur ou procédé.

Où commencer, où terminer ?

Puisqu’un changement de chapitre peut servir à plein de choses différentes (voir ci-dessus), et que tout est surtout affaire du choix de narration, il est littéralement impossible de donner ici un conseil d’ordre général. Tout dépend de ce qu’on veut faire avec son chapitre, d’à quoi il sert dans notre histoire. Si un auteur peine à gérer son découpage, c’est probablement parce qu’il ne sait pas trop ce qu’il fait et à quoi servent ses chapitres. À noter que ce peut être un soulagement bienvenu de ne pas trop s’embêter avec les chapitres lors de l’écriture d’un premier jet (si la narration le permet) : il est tout à fait possible d’attendre d’avoir une histoire complète pour opérer ensuite une forme d’organisation ou de réorganisation, et de retravailler à ce moment-là les césures et transitions.

Le conseil bateau qui revient toujours sur les chapitres est : « Commencez le plus tard possible dans l’action, terminez le plus tôt possible », et même si c’est un adage qui veut un peu tout et rien dire et manque de concret (car subjectif), il recèle à mon avis une part de sagesse, en particulier pour les débuts – trop de chapitres blablatent plusieurs lignes, paragraphes ou pages avant d’entrer dans le vif du sujet.

Il est souvent utile de se rappeler que les césures de chapitres sont particulièrement favorables à la création d’ellipses : changer de chapitre est un excellent moyen de ne pas avoir à raconter des choses inintéressantes entre deux moments clefs.

Ex. : Les personnages viennent de terminer un rude combat, et doivent maintenant voyager trois jours avant d’arriver dans une ville où se poursuivra l’intrigue. Si ce voyage de trois jours n’a pas d’intérêt narratif, autant ne pas le raconter : il suffit de conclure le chapitre à la fin du combat alors que les personnages évoquent leur prochaine étape en ville, et de commencer le suivant avec une phrase du type : « Trois jours plus tard, ils arrivèrent en ville ».

Ainsi, si le chapitre d’avant était une scène d’action, autant le clôturer dès la fin de l’action. Si le chapitre suivant cherche à mettre en avant la nouvelle ville comme étant le théâtre d’une intrigue, autant commencer par l’arrivée en ville. Une fois l’objectif du chapitre identifié, ça peut aider de chercher à le commencer « au plus tôt » de l’objectif, et de le conclure dès que l’objectif est atteint. Néanmoins, tout cela, ce sont des considérations très générales, et il existe bien trop de situations et de narrations pour que ce soit une règle à appliquer en toutes circonstances. De toute façon, on ne raconte pas pareil avec un narrateur omniscient, une 1ère personne au passé, une focalisation interne, etc.

Longueur des chapitres

J’ai volontairement conservé cette question pour la fin, parce que c’est celle qui revient le plus, mais qu’elle est celle qui a le moins d’intérêt. La bonne taille pour un chapitre, c’est celle dont le chapitre a besoin, et il suffit là encore d’ouvrir quelques romans dans sa bibliothèque pour se rendre compte à quel point les tailles de chapitres varient largement d’un livre à l’autre, d’un auteur à un autre, et même au sein d’un même livre (j’ai toujours du mal à croire que ce soit un débat).

C’est tout juste si – comme pour le marquage des chapitres – il est recommandé de garder une certaine cohérence dans un même ouvrage, le but étant essentiellement de ne pas inquiéter le lecteur ou le sortir de sa lecture par un écart trop énorme qui le ferait tiquer (« Tiens, c’est bizarre, le chapitre précédent faisait 25 pages et celui-ci en fait 4, n’y a-t-il pas un problème d’impression ? »).

À part cela, la taille des chapitres est un choix narratif et artistique, lié à la gestion du rythme dans l’histoire. Comme dit plus haut, le découpage en chapitres répond à un paradoxe : si un auteur enchaîne les chapitres courts, il crée un rythme frénétique et trépidant, mais chaque césure offre une nouvelle opportunité de pause au lecteur ; avec des chapitres longs, l’auteur crée plus facilement une ambiance et une profondeur qui captent, au risque de paraître lent. Et d’un autre côté, le lecteur sera peut-être plus enclin à commencer un nouveau chapitre s’il sait que ceux-ci sont courts, et il rechignera peut-être à se lancer dans un chapitre qui s’annonce long.

Mais tout cela sert essentiellement à façonner le ressenti recherché par l’auteur. Cela dépend des genres, des tons, des ambiances, des histoires. Et surtout, c’est un détail qui ne viendra jamais contrebalancer la qualité ou les défauts d’un récit : ce qui donne envie de continuer la lecture, c’est une bonne histoire, et aucune longueur de chapitre ne fera cela pour vous. Tout le reste, ce ne sont que des préférences personnelles, et tous les débats internet sur la taille des chapitres sont essentiellement du bullshit.

***

J’ai l’intuition que les auteurs de type « architecte », qui planifient leurs histoires à l’avance, ont peu de problèmes avec leur chapitrage : leur récit s’organise en amont en parties et sous-parties, et les chapitres apparaissent assez naturellement (même si de drôles de casse-têtes émergent parfois en cours de route). Les auteurs de type « jardinier », plus dans l’improvisation, ont peut-être plus de difficultés à savoir où commencent et où s’arrêtent leurs chapitres lors de l’écriture, mais je pense qu’ils ne devraient s’en soucier que plus tard, plaçant leurs césures au feeling et décidant en réécriture comment réorganiser tout ça.

Ensuite ? Court ou long, avec ou sans titre ? Eh bien, c’est affaire de narration, d’ambiance et de créativité, je suppose : le formatage des chapitres peut chercher à être le plus basique possible pour se faire transparent, ou peut viser la surcharge de fioritures pour créer de l’ambiance, du mystère ou de l’information. Mais les chapitres ne sont qu’un outil, et comment s’en servir dépend essentiellement de ce qu’on veut faire… et ça, personne ne peut le décider à notre place.

M’enfin, ce n’est que mon avis…


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(7 commentaires)

  1. Je me souviens d’un roman lu il y a quelques années, dont les chapitres étaient très courts (3-4 pages). Résultat, il y avait si peu d’évolution entre le début et la fin de chaque chapitre que j’avais l’impression qu’il ne se passait rien et que l’histoire n’avançait pas. Depuis, j’ai tendance à prendre avec quelques pincettes l’éternel conseil « faire des chapitres courts pour dynamiser la lecture »…

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    1. Oui ! C’est tout à fait mécanique, en fait : plus c’est court et moins il y a de contenu (qu’il s’agisse d’intrigue, de développement des personnages, de style, etc.). Certains types de romans s’y prêtent. D’autres, pas du tout.

      Et puis, effectivement, pour que le récit avance, il faut bien qu’il y ait du texte 😁

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    2. J’ai déjà eu ce ressenti également avec un roman qui enchaînait les chapitres courts. En revanche, j’aime bien la dynamique d’un texte qui, au milieu de chapitres moyens ou longs (j’aurais du mal à dire à partir de combien de pages on considère un chapitre long ?), s’intercalent des chapitres courts, voire TRES courts (moins d’une page). Lorsque cela se prête à l’histoire, je trouve l’effet de surprise plutôt chouette. ^^

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      1. Oui.

        Dans un vieil article sur les scènes d’action, j’utilise d’ailleurs l’analogie suivante : si on va très vite sur l’autoroute, le rythme finit par devenir monotone et on perd l’impression de vitesse avec le temps ; alors que si on roule comme un fou avec une petite voiture dans des ruelles, même si le compteur ne dépasse pas les 100km/h, l’enchaînement des pointes et des freinages brusques donne une grande intensité. Les variations apportent plus de rythme que faire toujours pareil.

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  2. Merci Stéphane pour ce nouvel article ! J’y pioche encore d’excellentes informations. Ayant rarement LA bonne idée pour donner un titre à mes chapitres, je me contente souvent d’une numérotation simple. Je note la remarque, excellente, d’éviter de sortir le lecteur d’une narration focalisée par des titres autre que numéroté.

    J’approuve complètement le fait que l’on se pose finalement un peu trop de questions sur cette question, d’autant que le chapitrage dépend énormément de tout le reste (type d’histoire, narration, etc…) Mais je ne vais pas redire ce que tu dis déjà si bien. ^^

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    1. Personnellement, je ne titre jamais mes chapitres : généralement j’écris en 3ème personne focalisée, donc avec une grosse emphase sur l’immersion, et mettre des titres est alors contre-productif à mon sens. Et sur La Brume l’emportera, le format de récit oral ne s’y prêtait pas non plus.

      Ensuite, il y a assurément une affaire de goûts personnels. Mais dans le doute, à moins d’être très motivé pour les titres, se contenter de numéros est un choix sans risque ! 🙂

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