What are the stakes ? Give us a reason to root for the character. What happens if they don’t succeed ? Stack the odds against.
Quels sont les enjeux ? Donne-nous une raison d’encourager ton personnage. Que se passe-t-il s’il échoue ? Accumule les obstacles sur son chemin.
[Que sont les règles d’or Pixar ? C’est expliqué ICI]
Ce conseil Pixar évoque des sujets que nous avons déjà abordés sur ce blog dans des articles dédiés : il parle d’enjeux, il parle d’obstacles, et il parle des raisons qui motivent le personnage. Il a l’avantage de les combiner dans une seule et même maxime, ce qui me permet de rédiger cet article sous forme d’une grande récapitulation.
En résumé : le personnage doit vouloir quelque chose qui le motive ; le personnage doit surmonter de nombreux obstacles pour l’obtenir ; les conséquences en cas d’échec doivent être fortes.
Aujourd’hui, j’essaie de te mettre ça en image pour une meilleure visualisation et mémorisation.
La formule
Ce conseil Pixar contient trois fondamentaux d’un récit, trois éléments qui fonctionnent ensemble. L’absence d’un seul d’entre eux fait s’effondrer le triangle.
Récit = Motivations + Obstacles + Enjeux
L’histoire idéale (allégorie)
Dans l’illustration ci-dessus, on sait ce que le personnage veut (le gâteau), on voit la difficulté qu’il doit franchir (un filin étroit, long et instable) et on comprend les enjeux (s’il réussit il aura son gâteau, s’il échoue il se tuera).
1. Motivations
Ton personnage ne peut agir que s’il possède l’envie d’agir. Il ne peut être le moteur de l’histoire que si quelque chose est son moteur, à lui. Nous parlons bien sûr ici de désir et de besoin, des éléments du récit qui motivent le personnage.
Rappel : le désir n’est pas la même chose que le besoin. Voici la différence et pourquoi je te conseille de réfléchir aux deux.
Sans motivations, l’histoire ressemble à ça :
Motivations = 0
Dans l’illustration ci-dessus, le personnage n’a besoin de rien ni envie de rien. Or, si on ne nous montre pas que le gâteau est important pour lui, nous sommes en droit de nous demander pourquoi diable il s’engage sur ce fil ! Difficile de s’identifier à lui : c’est un idiot, et à sa place nous resterions tranquillement sur la première plate-forme.
2. Les Obstacles
L’histoire n’est divertissante que si la réussite du personnage est incertaine, et elle n’est satisfaisante que si cette réussite est gratifiante. Si le personnage n’a qu’à tendre la main pour atteindre son objectif, quel intérêt a-t-on de lire son histoire ? Pixar conseille « d’empiler » les obstacles sur la route du personnage. Les multiplier augmente l’incertitude (c’est plus divertissant), mais cela augmente aussi le mérite du personnage (c’est plus gratifiant).
Rappel : pour qu’un obstacle augmente le mérite du personnage, le personnage doit bel et bien être celui qui franchit l’obstacle (si un autre personnage résout le problème à sa place, il s’agit d’un faux obstacle).
Sans obstacle, l’histoire ressemble à ça :
Obstacles = 0
Si le filin étroit, long et instable est remplacé par une passerelle large avec rambarde, plus courte et plus stable, nous perdons beaucoup de l’intérêt de l’histoire. Un funambule sur un fil nous captive. Quelqu’un qui traverse un pont ne nous passionnera pas.
3. Les Enjeux
Terminons par le point le plus souvent oublié (mais tu remarqueras que Pixar le cite en premier), à savoir les enjeux : le lecteur a besoin d’être au clair avec les conséquences des actes du personnage. Et pas uniquement avec les conséquences négatives, d’ailleurs :
– l’enjeu en cas de réussite doit être cohérent avec le besoin du personnage, afin qu’on ait des raisons d’espérer cette réussite (si le personnage veut retrouver son enfant kidnappé mais qu’on lui promet qu’en cas de réussite de sa mission il aura une médaille, on ne sera pas trop captivé par sa mission : il faut que la réussite de la mission lui permette effectivement de retrouver son enfant) ;
– l’enjeu en cas d’échec doit être terrible, ceci afin qu’on ait des raisons de craindre cet échec (si le personnage a besoin de sauver son couple, il faut bien expliquer que s’il échoue il sera plus que « un peu triste », sinon le lecteur se contentera de hausser les épaules en murmurant « une de perdue, dix de retrouvées ! »).
C’est cela qui provoque la tension : la conjugaison de l’espoir et de la peur. Quand Pixar te conseille de donner au lecteur une raison d’encourager le personnage, c’est ce que cela signifie : il faut lui donner quelque chose à espérer et quelque chose à craindre.
Parce que sans enjeux, l’histoire ressemble à ça :
Enjeux = 0
Ici il n’y a rien au bout du filin, et celui-ci n’est qu’à 30cm du sol. S’il n’y a rien d’intéressant à gagner et rien d’important à perdre, où sont le stress et la tension ? Les efforts déployés par le personnage pour vaincre les obstacles risquent de paraître guignolesques, parce qu’il n’y a pas de conséquences à ses actes, ni dans un sens ni dans l’autre.
L’ennui total (allégorie)
M’enfin, ce n’est que mon avis.
« Que se passe-t-il si nous échouons à faire une conclusion correcte ?
— Rien.
— Ah. C’est peut-être pour ça qu’on est chiants alors ? »
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Ce qui frappe quand on voit les films Pixar, c’est à quel point ce conseil est suivi à la lettre, et même littéralement. Dans tous les films, il y a une, voire plusieurs scènes où des personnages disent sans aucune ambiguïté: « Je veux A, mais je ne peux pas l’avoir à cause de B, et si je n’y arrive pas, alors il va nous arriver C! »
Le conseil est important du point de vue de la construction de l’intrigue, mais il faut également parvenir à communiquer tout ça aux lecteurs, et les auteurs de Pixar semblent penser que le meilleur moyen, c’est encore de le dire explicitement.
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C’est (très) vrai.
Je ne pense pas que cela soit un problème : après tout, s’il est si capital que le lecteur/spectateur ait bien conscience de tout cela, autant ne laisser aucune place au doute et à l’interprétation, n’est-ce pas ? les gens de chez Pixar doublent le « montré » d’un limpide « raconté ». Peut-être too much, mais hey ! Au moins c’est clair (et puis Pixar a un public cible très large qui inclut des enfants).
Il faut aussi garder en tête la différence de média. Un film a des exigences de timing et de vitesse que nous (auteurs de fiction) n’avons pas. Nous pouvons nous permettre plus de subtilité qu’une tirade pareille. Néanmoins, quitte à la couper en réécriture, je me demande si on ne devrait pas se forcer à l’écrire, cette tirade – juste pour se prouver à nous-mêmes que notre récit est bien clair sur tous ces points-là.
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Ah mais je ne critique pas, au contraire. Les romanciers ont toujours peur d’avoir l’air bête s’ils sont explicites. Je pense que les enjeux, les objectifs, les obstacles, c’est un domaine où au contraire il faut être aussi clair, aussi déclaratif que possible. L’impact sur le lecteur sera plus grand, et il n’y trouvera probablement rien à redire.
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J’aime beaucoup tes petits dessins, c’est très clair ! Merci de nous rappeler ces principes de base mais qui sont vraiment essentiels
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